Peace Maker de Nanae Chrono

Peacemaker fut publié au Japon dans le magazine Monthly Shônen Gangan de Enix sous le nom de Shinsengumi Imon Peace Maker. A l'image de Saiyuki (publié dans le magazine G-Fantasy du même éditeur), Peace Maker n'alla pas jusqu'au bout de sa publication et déménagea chez un autre éditeur, Mag Garden, dans le magazine Comic Blade sour le nom de Peace Maker Kurogane (2001). Alors que Monthly Shônen Gangan s'adressait plutôt à un lectorat shônen (jeunes garçons de dix à vingt ans), Comic Blade s'adresse à la fois aux garçons et aux filles. La série fut adaptée par le studio Gonzo en un anime de 24 épisodes en 2002.
Peacemaker est une de ses séries dont on n'attend rien de particulier au départ mais qui parvient à surprendre. Le lecteur suit le parcours initiaque du jeune Tetsunosuke. Les deux premiers volumes déconcertent quelque peu en raison de l'humeur bon enfant qui règne dans les pages. Lit-on bien un manga qui évoque l'une des périodes les plus sombres du Japon, celle qui vit la naissance de l'ère Meiji ? A travers les yeux de Tetsunosuke, la plupart des protagonistes paraissent au final bien sympathiques dans leurs qualités et défauts. Tous sont au petit soin avec l'adolescent ou se contentent de le taquiner (hormis Hijitaka, qui se montre plus dur). Où sont donc les terribles loups de Mibu, les démons, censés protéger le Bakufu mourant ? Comment des guerriers si expérimentés peuvent-ils accepter les stupidités de l'innocent Tetsunosuke ? Certes, le début du manga réserve quelques passages sanglants mais les membres du Shisengumi sont bien plus montrés dans leur vie de tous les jours qu'au coeur du combat. Et c'est peut-être là le principal atout de Peacemaker : humaniser les combattants du Shisengumi pour mieux nous plonger dans l'action dramatique des tomes suivants. Tetsunosuke qui découvrait l'amour grâce à la jeune Saya doit faire face à la perte d'un être proche et à la haine de son ami, Suzu, serviteur de Yoshida Toshimaro, le leader du clan Chôshû. La fin de l'innocence pour le garçon et le début de l'ère la plus sombre du Shisengumi, où certains ne trouveront que la mort.
Peacemaker n'est cependant pas exempt de défauts. Les scènes de combat sont parfois brouillones, ce qui s'avére quelque peu décevant pour un manga sur le Shisengumi, et Nanae Chrono semble plus à l'aise dans la mise en scène des passages humoristiques. Autre point agaçant : les personnages ont tendance à avoir une tête hideuse et déformée dès lors qu'ils se mettent en colère. Ce qui, hélas, à tendance à faire sourire lorsque la scène se veut dramatique.
Quant à ceux qui éprouvent une haine viscérale du boys love, ils seront agacés par les quelques sous-entendus, comme lorsque Tôdô Heisuke s'imagine certaines choses sur la relation entre Hijitaka et Tetsunosuke... Mais de l'auteur de Vassalord (manga classé en seinen en France alors qu'il est publié dans Comic Blade Avarus, un magazine josei muke), il aurait été étonnant de ne pas avoir quelques grammes de fanservice. Les fans de boys love seront quant à eux déçus que ces petites touches d'ambiguités... n'aillent pas plus loin.
Malgré tout, les mangas sur le Shisengumi restent rares et il serait dommage de ne pas se laisser tenter par les cinq volumes que comportent la première série. De plus, Kami propose une adaptation intégrale (ce que certains, attachés à ce que les onomatopées japonaises soient conservées, jugeront comme un défaut), le papier proposé est plutôt de bonne qualité et les couvertures ont beaucoup de style. Seul regret : l'absence des pages couleurs. Il faut admettre que l'impression de leur version N&B n'est pas particulièrement jolie, pour ne pas dire qu'elle pique les yeux.